Le projet de loi publié le 19 mars, et source de polémique depuis, a été voté hier à 438 voix contre 86, 42 élus s’étant abstenus. Windows Fun revient sur les changements sur les renseignements qu’imposent cette nouvelle loi.
Cette loi revient sur celle déjà votée en 1991 permettant d’intercepter certaines communications électroniques.
Plus de moyens techniques
Tout d’abord, loi apporte de nouveaux moyens techniques à la surveillance. Aux traditionnelles écoutes téléphoniques s’ajoutent l’utilisation de caméras et de micros, ainsi que de keyloggers, des applications permettant d’enregistrer tout ce que vous tapez au clavier. Rassurez-vous (ou pas), seulement certains agents spécialement habilités auront le droit de poser ces dispositifs, dont l’écoute sera limité à deux mois contre quatre pour les keyloggers. L’utilisation de trackers GPS sera aussi autorisé: oui, 24h chrono n’est plus e la fiction: vous avez peut être un GPS caché sous votre pare-choc…
Plus de motifs pour avoir recours au renseignement
Auparavant limitées dans les cas d’extrème urgence nationale: terrorisme, sécurité nationale, prévention de la criminialité,… les motifs d’utilisation de cette surveillance se voient élargis. Les services de renseignements pourront avoir recours à ces techniques pour la défense nationale, les intérêts de politique étrangère, les intérêts économiques ou scientifiques majeur. C’est cette « défense nationale » assez ambigüe qui a beaucoup fait débat: en effet, on pourrait déjà imaginer la surveillance d’un parti politique opposant surveillé pour motif de « défense nationale ». Malgré ce débat, ce motif fera bien parti de la loi.
Les autorités compétentes élargies
Une nouvelle commision, chargée de contrôler les techniques de surveillance mises à disposition est créée: la Commission Nationale de Contrôle des Techniques de Renseignements (CNCTR). Les services de renseignements doivent avoir recours à la CNCTR pour utiliser les nouvelles techniques. Le problème, et c’est ce 2ème point qui fait parler de lui, est que cet avis n’est que consultatif, et le premier ministre n’est pas obligé de l’écouter, peut aller à son encontre. La CNCTR ne peut stopper la surveillance, et son seul recours est de saisir le conseil d’Etat (après un vote à majorité absolute bien-entendue).
Les Opérateurs Internet
Des boîtes noires pourront être installées chez les opérateurs internet afin d’enregistrer les meta-données (et non les contenus). Ces données seraient par exemple les dates d’envoi et de réception de messages, les adresses IP, les adresses e-mail,… A partir de ces données, on peut en fait savoir beaucoup de choses et ces données ne préservent donc pas l’anonymat, contrairement à ce qui a pu être dit.
120 000 signatures contre
Depuis l’annonce de cette loi, de nombreux organismes se sont élevés contre, y-compris Ligue des droits de l’homme, la CNIL, ainsi que, et c’est là un beau paradoxe, Charlie Hebdo qui est le prétexte qui a déclenché l’écriture de cette loi. De nombreuses sociétés ont signé la pétition Ni pigeons ni espions, dénonçant l’inneficacité de cette loi, ainsi que les risques économiques liés: en effet, quelle société du numérique irait s’implanter en France sachant qu’elle peut être surveillée et écouter aussi facilement ?
Outre le problème économique, le respect de la vie privée est un droit fondamental qui semble clairement en danger: tous les citoyens pouvant être mis sur écoute.
Voici une interview de Tristan Nitot, ancien responsable de Mozilla Europe, actuellement membre du conseil national du numérique, qui soulève l’inefficacité des nouveaux moyens d’écoute, ainsi que les risques liés à l’économie et à la vie privée: