Avec Windows Phone 7 Microsoft était leader dans l’industrie du design alors qu’avec Windows 10 Mobile, l’inverse semble vrai…

Les Débuts de Windows Phone

Avec la sortie de Windows Phone Series 7 et le language Metro, le design était au coeur de l’expérience du smartphone.

Microsoft, mené par l’équipe de Joe Belfiore, a lancé le flat design avec une interface à la fois jolie et fluide.

Tout ceci au moment où Android se cherchait encore et où iOS commençait clairement à s’essouffler: sont interface n’ayant que très peu évolué depuis la sortie du 1er iPhone.

D’abord critiqué — oui: c’est Microsoft, c’est forcément moche. Et puis Apple ne fait pas de flat design, donc ce n’est pas bien — l’interface a rapidement était acceptée, et même encensée par la critique et le monde du design en général.

Chaque année, l’Industrial Designers Society of America organise une compétition pour élire les produits au meilleur design. En 2011, lors de la sortie de Windows Phone 7, Microsoft a été nomminé trois fois et a remporté le prix Or dans la catégorie Expériences de Produit Interactives.

Sans le savoir, ni le vouloir, Windows Phone a lancé la mode du flat design, copié par Apple depuis iOS 7 et Android (qui, emmené par Mathias Duarte a aussi lancé sa révolution du design chez Google).

Windows Phone était aussi la preuve que Microsoft avait compris, après Apple, l’intérêt du design-centric.

Metro: Fast and Fluid

Windows Phone signifiait fluidité incarnée. Malgré du matériel peu performant pour l’époque (256Mo RAM, processeurs lents), l’interface était rapide, les transitions entre les applications fluides, tout le temps.

Mais ce n’est pas tout: le langage utilisé pour l’interface (design language) était clair et cohérent sur toute l’interface (et la plupart des applications). Il introduisait par exemple la notion de pivots & panorama pour la navigation, l’Application bar, et bien d’autres éléments propres à Windows Phone:

Metro: un design cohérent

Toutes les applications Windows Phone reprenaient ce design pour une cohérence parfaite ou presque au sein du système.

Certains critiqueront la différence par rapport à iOS, qui pouvait rendre Windows Phone difficile d’accès pour une personne n’ayant utilisé qu’une interface Apple ou Google, mais la logique des choses, et le fait que le language du design restait le même sur toutes les applications rendait son utilisation intuitive.

Bien sur, elle n’était pas parfaite non plus loin de là: Windows Phone possédait quelques limitations assez ennuyantes.

Windows Phone 7 ne proposait pas de copier-coller à sa sortie, et il a fallut attendre la première vraie mise à jour Mongo pour voir arriver du multitâches digne de ce nom.

De plus, les tuiles interactives affichent parfois des informations que l’on ne retrouve pas en cliquant dessus (par exemple: la tuile « photos » affiche une photo particulière, et en cliquant dessus, impossible de la retrouver).

Enfin, le lancement des applications était relativement lent, et le fameux écran « reprise » que l’on voit lors du passage entre deux applications cassait le côté fluide de Metro.

Mais personne n’est parfait et aucune interface n’est parfaite… surtout lors de la première version. L’iPhone ne pouvait pas envoyer de SMS à sa sortie, ça ne l’a pas empêché de défrayer la chronique.

Windows Phone 8: mise à jour itérative

En Septembre 2012 sortait Windows Phone 8 qui a repris en grand partie l’interface de son prédécesseur (qui fut renommée ModernUI) mais en remplaçant le noyau Windows CE par Windows NT.

De plus, il permettait de développer des applications natives C/C++ afin d’obtenir plus de performances et de faciliter le portage d’applications (notamment des jeux) à partir d’Android ou iOS.

Windows Phone 8 supporte aussi de nouvelles résolutions, les processeurs multi-core, rajoute le support NFC natif, ainsi que Data Sense pour surveiller votre consommation de données:

Au niveau de l’interface graphique: pas de grandes évolutions, mais ce n’est pas un problème.

Il faudra cependant attendre Windows Phone 8.1 pour voire apparaître un centre de notifications qui commençait vraiment à faire défaut.

Cette mise à jour rajouter aussi Word Flow: un clavier reprenant le principe de Swipe pour Android qui permet d’écrire en glissant ses doigts sur les lettres à taper.

Au niveau de l’interface graphique: pas de grandes évolutions

Plusieurs mises à jour viendront améliorer le système, et rajouter plusieurs éléments venant du PC comme Cortana qui pourra être activé par la commande Hey Cortana!, le support double SIM, etc…

Mais si on exclut l’ajout de la possibilité d’afficher plus de tuiles sur l’écran d’accueil, l’interface n’évolue pas, mais est-ce qu’elle avait besoin d’être modifiée ?

L’arrivée de Windows 10 Mobile: changement radical du design

Le langage Modern UI, si bien défini depuis Windows Phone 7 est grandement modifié sans vraiment suivre de logique.

Finis les panoramas permettant de naviguer à l’intérieur d’une application: pas très adaptés au PC. Microsoft les supprime et reconnaîtra que ce n’était pas un bon modèle.

Une partie des options que l’on retrouvait dans la barre d’application se retrouve parfois intégrée dans un menu hamburger très populaire sur Android, parfois non.

Et c’est bien là le plus gros problème de l’interface: les règles concernant l’interface ne sont pas respectées partout.

Des incohérences qui rendent l’interface bien moins agréable

Ces changements ne seraient pas un problème s’ils étaient clairs, et repris dans toute l’interface (et surtout dans les applications de base: il faudra bien sur du temps pour que les applications tierces soient mises à jour).

Mais là, ils ne semblent clairement pas définis, un peu comme si chaque application était développée par une équipe différente qui ne suivait pas exactement les mêmes règles.

Prenons l’exemple de l’option paramètres des applications, et bien elle n’est jamais positionnée au même endroit, et pire, le menu n’a jamais la même apparence: couleur de fond différente, taille de police différente, icônes ou non, césure horrible des éléments du menu lorsqu’ils sont trop longs:

Le thème noir est maintenant alterné entre noir et clair, sans aucune logique, même à l’intérieur d’une application!

Ce ne sont que quelques exemples, mais le problème c’est que Windows 10 Mobile en est rempli.

Windows 10 Mobile ne corrige pas certains problèmes présents depuis 2010

Pour continuer, Windows 10 ne résout toujours pas certaines limitations de Windows Phone 7 qui entachent l’expérience utilisateur:

• Il n’est toujours pas possible de télécharger en arrière-plan dans Microsoft Edge
• Le Fast Resume n’est toujours pas le mode de fonctionnement par défaut
• L’installation des applications est toujours aussi lente (alors que les smartphones actuels sont bien plus puissants que ceux de 2010)
• Windows 10 affiche constamment des écrans de chargement « reprise » qui interrompent l’utilisateur et ne rendent le système pas du tout fluide
• Skype ne fonctionne toujours pas aussi bien que les versions Android & iOS et ses fonctionnalités sont toujours en retard (pas de vidéo de groupe, etc…)

Windows 10 introduit des nouveautés intéressantes, sans les exploiter

Si l’interface peut être critiquée, Microsoft a quand même introduit de nombreux éléments intéressants et uniques mais ne semble pas aller au bout de ses idées.

Le mode Continuum est génial, mais reste pour l’instant limité aux seules applications universelles: à l’exception du navigateur, de l’application Messages et de Office, rares sont les applications supportées.

Imaginez la même chose où toutes les applications fonctionnent, et son lancées dans une fenêtre si elles ne sont pas universelles, à l’image de ce que propose par exemple Remix OS pour Android.

Continuum prendrait alors tout son sens et serait autrement plus impressionnant:

Windows 10: connectivité entre PC/Smartphone/tablette limitée

Sur un PC ou tablette Windows 10, il est possible d’utiliser Cortana pour envoyer à un SMS, mais c’est pour l’instant tout ce qu’il est possible de faire: impossible de recevoir ses messages SMS sur son PC ou tablette et impossible de consulter l’historique de ses messages via l’application Messages sur un ordinateur.

L’intégration de Skype n’est pas complète: il est possible de démarrer une conversation sur Skype à partir de son mobile mais par la suite il est impossible de changer le mode de communication pour par exemple finir avec les SMS: pourquoi ?

Sur MacOS X il est possible depuis plusieurs années non seulement d’envoyer et recevoir ses messages sur ordinateur, mais aussi de prendre ses coups de téléphones sur un PC, pourvu que l’ordinateur et le téléphone soit à une distance maximale.

Microsoft contrôle les deux systèmes: Windows 10 et Windows 10 Mobile. Microsoft contrôle aussi le matériel puisqu’ils sont maintenant propriétaires de Lumia racheté à Nokia.

Pourquoi la communication entre les deux est-elle toujours aussi limitée ?

Même sur Android, des outils comme Pushbullet permettent depuis longtemps d’envoyer et recevoir ses messages sur ordinateur !

Il est par exemple possible d’envoyer un SMS via un PC, à n’importe quelle personne. Les notifications peuvent être affichées sur l’ordinateur, et il est même possible d’intéragir avec celles-ci lorsque la fonction est disponible.

Manque de leadership ?

Même en excluant les problèmes liés au statut Beta de Windows 10 Mobile qui n’est pas encore disponible en version finale — bien que plusieurs smartphones soient déjà vendus avec, dans son état actuel — trop d’imperfections sont encore présentes.

C’est un peu comme si le design de Windows 10 Mobile ne suivait pas de règles pré-définies, comme cela semblait être le cas pour Windows Phone 7 Series.

On peut se demander si l’absence de Joe Belfiore, qui a pris une année de repos bien méritée n’y est pas pour quelque chose… Joe: reviens! ;)

La guerre des applications

En plus, Microsoft semble mener une guerre des applications perdue d’avance. Mais le manque d’applications est-il vraiment le problème ?

Certes, quelques applications très utilisées sur les autres plateformes n’ont pas d’équivalent sur Windows 10 Mobile (Snapchat,…), mais les applications existantes sont très rarement mises à jour et souvent très en retard par rapport aux versions Android & iOS.

Et c’est peut être là le problème: la qualité des applications ne semble pas au rendez-vous et le suivi n’est pas aussi bon qu’il devrait l’être: les utilisateurs se sentent délaissés.

La pauvre qualité du Windows Store actuelle n’améliore en rien ce problème:

• Lenteur et manque de fiabilité
• Moteur de recherche très peu laxiste et qui remonte souvent des copies illégales avant même l’application officielle recherchée

L’écosystème Modern UI: quel écosystème ?

Windows Phone n’a jamais vraiment réussi à créer un écosystème autour de Modern UI qui permettrait à la plateforme d’être auto-suffisante comme cela peut être le cas sur MacOS X par exemple.

Lors de la sortie de Windows Phone 7, ce travail a démarré mais avec la concentration de Microsoft sur le lowcost et sur le nombre et le portage d’applications plutôt que sur l’originalité et la qualité, il s’est vite dissous.

Et maintenant que le design est sans chef de barre, cela risque de devenir de plus en plus compliqué d’en développer et maintenir un…

Difficile de survivre dans le monde mobile

Le marché du mobile est sans pitié et il faut sans cesse se renouveler et avoir les reins très solides.

On ne compte plus le nombre de nouveaux sur le marché qui ont fermé boutique avant même d’être disponible.

Le dernier en date n’est autre que Mozilla qui vient d’annoncer l’arrêt du travail sur Firefox OS pour smartphone qui sera recyclé pour d’autres utilisations.

Après l’échec de BlackBerry qui vient de lancer un téléphone sous Android, Windows 10 Mobile est donc la dernière alternative au duo-pole Google/Android.

Mais pour combien de temps ? L’avenir nous le dira, mais certains organismes de presse pessimistes mentionnent déjà la mort de Windows Phone.

Nous, nous avons envie d’y croire, mais pour cela il faudrait vraiment un gros travail de finition sur Windows 10 Mobile, et un Surface Phone pour mettre en valeur ce travail.

On peut rêver…